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RDC : Que dira le Président Joseph Kabila ?
L’ultime réunion entre le Chef de l’Etat et les évêques de la CENCO s’est tenue mardi 28 Mars 2017 à Kinshasa, une ville sous tension suite à l’échec cuisant de l’arrangement particulier sous les hospices des évêques catholiques. Le communiqué de la Présidence de la République au terme de cette rencontre a annoncé l’adresse de Joseph Kabila «prochainement» devant le Congrès.
Si cet exercice est prévu par l’article 77 de la Constitution, le recours à ce mécanisme dans cette période de l’année est un fait rare. De manière générale, le Chef de l’Etat s’adresse à la nation devant le Congrès au dernier trimestre de l’année pour faire l’état de la nation. Que dira-t-il donc ? Zoom Eco tente, par cette analyse des faits, de répondre à cette question.
Elections dans le délai
L’incapacité reconnue par les évêques d’accorder les voix de principales composantes protagonistes «Majorité Présidentielle et Rassemblement» met de la pression sur le Président de la République. Joseph Kabila est visiblement invité ici à agir en tant que « Garant du bon fonctionnement des institutions » pour éviter que la situation économique, financière et sociale, tenue en haleine par la crise politique du pays, ne dégénère davantage.
Pour cet exercice, le Chef de l’Etat devrait se départir de sa casquette d’Autorité Morale de sa famille politique « Majorité Présidentielle » et indiquer la voie, la bonne qui permette au peuple d’atteindre, dans le délai fixé par l’accord politique, l’objectif du renouvellement de la classe politique à travers les élections. Il s’agit là de l’attente majeure.
Crainte sur le référendum
Nombreux sont ceux qui continuent d’y penser même si l’accord du 31 décembre est sensé avoir mis fin à cette éventualité. Le décès d’Etienne Tshisekedi, l’exil forcé de Katumbi, l’affaiblissement de Vital Kamerhe, la bonne santé du jeune Président de la République, le contrôle des services de l’Etat, … conforteraient ceux qui tiennent à cette possibilité pensant éventuellement que l’accord est mort Tshisekedi.
Quoi qu’en pensent certains extrémistes, l’accord du 31 décembre 2016 est bel et bien en application du moins pour ce qui concerne le Chef de l’Etat et les élus. Même si c’est le programme du Gouvernement issu de l’accord du 18 octobre 2016 qui est en cours de mise en œuvre.
Le référendum requiert une forte mécanique et sa mise en œuvre est similaire à une opération électorale. Cependant, il semble peu probable. D’abord puisqu’il n’existe pas de loi référendaire en vigueur en RDC et que le calendrier de cette session parlementaire en cours ne prévoit aucune initiative du genre parmi les matières inscrites à l’ordre du jour.
Toutefois, le message de Joseph Kabila devrait aussi apporter une réponse claire sur ce point et mettre ainsi définitivement un terme au suspens qui entoure ce sujet : « Référendum ».
Felix Tshisekedi ou Pierre Lumbi
Au vu de l’impossibilité clairement exprimée par les négociateurs de la CENCO de parvenir à un accord autour de la Primature et du Conseil National du Suivi de l’Accord (CNSA), il est clair que le Président de la République devra trancher après consultation, notamment du Président du Rassemblement. Si tous les partis de cette plate-forme y compris les dissidents reconnaissent la personnalité de Felix Tshisekedi ce n’est pas le cas pour Lumbi.
Selon la reformulation proposée par la CENCO, l’accord prévoit que le Président de la République nomme le Premier Ministre après consultation du Rassemblement. Félix Tshisekedi, en tant Président du Rassemblement, est donc « de fait » l’interlocuteur valable de Joseph Kabila pour le dénouement de cette question. Joseph Kabila devrait donc trancher sur la fameuse affaire des trois noms.
Ce qui n’est le cas pour Lumbi à la tête du CNSA dont la désignation ne tient pas compte de l’esprit de l’accord qui suppose l’existence préalable d’un consensus de tous les signataires de l’accord y compris ceux de la Majorité Présidentielle comme ce fût le cas pour Etienne Tshisekedi. « Nous ne pouvons pas laisser pareil poste être occupé par celui qui nous a trahi», tempêtait Emanuel Shadary lors de la conférence de presse précédant la dernière plénière des travaux de la CENCO.
Autres sujets importants
Le Président de la République devrait aussi s’exprimer sur la situation sécuritaire de plus en plus inquiétante dans le Kasaï ce qui handicape le bon déroulement du processus d’enrôlement dans cette partie du pays. Processus qui pourtant semble bien se dérouler dans l’ensemble du territoire dépassant à ce stade plus de 20 millions d’enrôlés.
Le Chef de l’Etat aura également l’occasion de donner un signal fort au sujet de la lutte contre la corruption, la fraude fiscale, le détournement des deniers publics, … et l’impunité. Autant de maux qui gangrènent la société congolaise contribuent substantiellement au coulage des recettes publiques et à la destruction de l’économie du pays.
Il y a aussi les questions liées aux violations graves et massives des droits de l’homme à travers le pays marquées entre autres par la répression des voix contestataires et la restriction de l’espace démocratique.
Toutefois, Joseph Kabila se donne l’occasion de lever les équivoques sur certains soupçons qui pèsent sur son pouvoir, d’annoncer des décisions pratiques pour la bonne conduite du processus électoral encours et naturellement, d’agir en vue de parachever la mise en œuvre de l’Accord de la Saint Sylvestre. Plus qu’une simple adresse, c’est un instant de vérité sur qui aura le peuple comme témoin ou juge du fiasco de la classe politique.
Comme dans ses habitudes de précéder la nomination par la fixation des objectifs, Joseph Kabila pourrait nommer le successeur de Samy badibanga Ntita quelques heures après son adresse à la nation. Wait and see !
Zoom Eco