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RDC : aux sous-commissariats de Police de Kinshasa, près de 2 millions USD échappent au Trésor public par an (Enquête)

Près de 2 millions de dollars américains échappent au Trésor public chaque année à travers des sous-commissariats de police disséminés à travers la ville de Kinshasa. C’est ce que révèlent les conclusions d’une mini-enquête menée par un groupe de journalistes indépendants à Kinshasa.
Pendant trois mois, les enquêteurs ont recueilli des informations auprès de quelques agents de la PNC ainsi qu’auprès des assujettis-victimes.
Sur les 100% d’agents interrogés, 60% affirment avoir empoché les fonds perçus à cause de leurs conditions socioéconomiques précaires ; 20% ne reconnaissent l’existence de la perception d’amendes transactionnelles. 20% attribuent le détournement des fonds perçus à l’absence de receveurs de la Direction générale de recettes administratives, domaniales et de participation (DGRAD) au niveau des sous-commissariats.
« Une moyenne de 2 000 USD est perçue chaque jour au niveau des sous-commissariats de Police de Kinshasa. Les propriétaires d’engins motorisés et autres engins roulants figurent parmi les grands pourvoyeurs des poches d’officiers et sous-officiers affectés aux commissariats de Police à travers la ville. Après paiement d’amendes, aucune preuve de paiement n’est remise à la partie versante. », renseigne le rapport d’enquête.
Et d’ajouter : « 90% de subalternes interrogés ont renseigné que les sommes perçues sont partagées entre les responsables de sous-commissariats. Une partie importante du butin est renvoyée à certains hauts responsables de la PNC pour espérer garantir son poste. En cas de manque de générosité avéré, le policier jugé avare est affecté dans un sous-commissariat moins prolifique. En cas de récidive, ce dernier se voit vite placé à un poste non pourvoyeur de recettes ».
Il faudrait noter que dans des sous-commissariats situés dans des communes périphériques telles que N’Sele, Kimbanseke, Masina et autres, la majeure partie des sommes empochées proviennent des rançons opérées auprès des paisibles citoyens par des policiers-patrouilleurs qui, pour la plupart, sont des agents fictifs introduits par des responsables au niveau des districts et ne sont comptés dans les effectifs retenus notamment par les services de paie.
Ici, le rapport d’enquête indique que les sommes hebdomadaires perçues sont partagées entre les éléments ayant travaillé pendant cette période avant qu’ils ne soient relevés au profit d’une autre équipe. Une fois en poste, ajoute le rapport, la nouvelle équipe a l’obligation de rançonner le plus de citoyens possible pour espérer rentrer à domicile avec un butin important.
« J’ai été recruté par mon beau-père il y a deux mois. Mon nom ne figure pas encore dans les effectifs officiels. Chaque semaine, le major me rétrocède une somme qui varie entre 500 000 et 850 000 Francs congolais. Et si cela coïncide avec ce que me rapporte la ristourne, le total perçu atteint parfois 1 500 000 Francs congolais par semaine, l’équivalent de 750 USD. Ainsi, sans salaire, je puis bien m’occuper de ma petite famille après avoir versé quelque chose à celui qui m’a recruté. », a confié sous le sceau de l’anonymat, un policier habitant la commune de N’Sele.
Le rapport d’enquête souligne que dans la commune de Limete principalement au quartier Kingabwa, des policiers basés dans la concession appartenant à la société STUC de triste mémoire opèrent des rafles en plein jour. Ici, les propriétaires des véhicules et motos sont signalés comme premières victimes. Des amendes payées varient entre 100 000 et 1 000 000 de Francs congolais. Des sommes qui, selon le rapport, sont partagées entre les hauts gradés et leurs soutiens au niveau provincial.
Olivier KAFORO