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RDC : Fiyou Ndondoboni alerte sur une planification urbaine défaillante

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La ville de Kinshasa a récemment été frappée par de graves inondations suite aux fortes pluies qui se sont abattues du 19 octobre 2024, causant d’importants dégâts matériels.

Dans une interview accordée à zoom-eco.net, Fiyou Ndondoboni, Président de l’Ordre des architectes de la République Démocratique du Congo, a souligné que cette catastrophe est le résultat d’une planification urbaine déficiente.

Il avertit que si des mesures correctives ne sont pas prises rapidement, les générations futures risquent d’hériter d’un pays en déclin, soulignant l’urgence d’une révision des politiques d’aménagement du territoire.

Zoom Eco : Quels facteurs architecturaux ou urbanistiques ont contribué aux dégâts observés lors des récentes pluies à Kinshasa ?

Fiyou Ndondoboni : Par rapport à la question des pluies, il faut retenir un grand principe : lorsqu’on conçoit une ville, il faut planifier pour organiser l’évacuation des eaux. Cela va au-delà de la simple répartition des espaces et de la zonification en général. L’un des éléments les plus importants est la gestion des réseaux de la ville : la voirie, l’assainissement et les évacuations. Il est essentiel d’en tenir compte.

Zoom Eco: Quel rôle joue la planification urbaine dans la gestion des eaux pluviales à Kinshasa ?

Fiyou Ndondoboni :
Il faut partir d’un principe : la capacité d’absorption et d’évacuation des eaux doit être supérieure à l’intensité des pluies. Il ne s’agit pas seulement des eaux de pluie, mais aussi des eaux usées des ménages ou des bâtiments administratifs, telles que les eaux vannes. Tout cela doit être organisé. Le problème à Kinshasa est que, lorsqu’il pleut, la capacité d’absorption des eaux n’est pas suffisante pour les évacuer rapidement, ce qui entraîne des inondations. Pourtant, la ville dispose de voies naturelles d’évacuation, comme les rivières et le fleuve, ainsi que quelques collecteurs. Cependant, ces collecteurs ne fonctionnent pas, car on n’a pas pris le temps de les nettoyer pendant la saison sèche, et ils sont remplis d’immondices.
En résumé, la gestion d’une ville repose sur la planification, qui inclut la prévention et la gestion quotidienne. Il est nécessaire de disposer d’informations suffisantes pour déterminer la quantité d’eau à évacuer, et d’avoir les collecteurs adéquats, comme pour un réseau routier (primaire, secondaire, tertiaire). Ainsi, il faut prévoir des infrastructures au niveau des quartiers, des routes secondaires et des voies principales pour acheminer les eaux jusqu’au fleuve ou à d’autres zones naturelles. Le Gouverneur actuel de Kinshasa devrait réfléchir en termes de planification : quels nouveaux collecteurs faut-il mettre en place et par où doivent-ils passer ?Malheureusement, certains bâtiments devront être démolis, car ils ont été construits sur des collecteurs. Il existe aussi des bouches d’absorption bouchées dans la ville. Il est donc nécessaire de récupérer le plan initial de Kinshasa, s’il existe encore, pour identifier les collecteurs, ou bien d’en créer un nouveau. Il faut envisager une approche à court, moyen et long terme, afin qu’à l’avenir, il n’y ait plus d’inondations à Kinshasa. La planification inclut également des dispositions pour nettoyer régulièrement les caniveaux et évacuer les déchets, afin qu’ils ne réintègrent pas les caniveaux à la prochaine pluie. Les équipes en charge du nettoyage des grandes routes doivent être formées pour ramasser et évacuer les déchets correctement.
Il existe des stratégies concrètes qui peuvent aider les pouvoirs publics, mais elles ne se résument pas à une interview. Cela exige une véritable expertise.

Zoom Eco : Comment l’Ordre des Architectes du Congo, dont vous êtes le Président, collabore-t-il avec les autorités locales pour prévenir de tels désastres ?

Fiyou Ndondoboni : Nous avons commencé ce travail, notamment avec l’actuelle ministre de l’Urbanisme. Elle nous consulte pour toutes les questions concernant les villes et son secteur. Cependant, nous n’avons pas encore échangé avec le gouverneur actuel de Kinshasa. Il y a plusieurs problèmes, comme la question des inondations ou celle de la mobilité urbaine, avec des embouteillages énormes. Nous avons des propositions de solutions. La loi exige que les structures de l’État consultent l’Ordre des Architectes, considéré comme le conseil technique du gouvernement sur les projets de développement, d’infrastructure et d’architecture urbaine.
Nous sommes disponibles et il suffit que l’on nous invite. Un exemple récent concerne le Task Force mis en place pour gérer les prisons de la ville de Kinshasa après l’évasion de prisonniers à Makala. L’Ordre des Architectes n’a pas été invité, alors que les architectes doivent travailler sur la fonctionnalité des prisons conformément aux exigences du Gouvernement. Il est crucial que les autorités reconnaissent l’importance du rôle des architectes.

Zoom Eco : Quelles mesures immédiates devraient être prises pour remédier aux dégâts causés par ces pluies ?

Fiyou Ndondoboni : Comme je le dis toujours, la planification est essentielle. On ne peut pas résoudre les problèmes sans une planification en amont, à court, moyen et long terme. À court terme, il faut rendre opérationnelles les infrastructures existantes. Par exemple, je suis passé par Komoriko et j’ai vu que des efforts étaient faits, mais les immondices extraites des caniveaux n’ont pas été évacuées, et tout est retourné à l’intérieur. Il faut terminer le travail : lorsque l’on sort les déchets, il faut les évacuer immédiatement. Il est également important de sensibiliser la population pour qu’elle ne jette pas ses déchets dans les collecteurs ou les caniveaux. Une discipline de gestion est nécessaire, avec une méthodologie permettant d’entretenir régulièrement les infrastructures. Si l’on ne prend en compte que les aspects politiques, sans se soucier des aspects techniques ou des compétences, nous continuerons à rencontrer des problèmes, comme c’est le cas aujourd’hui. Nous avons une responsabilité envers les générations futures. Le Congo que nous allons léguer à nos enfants doit être meilleur que celui que nous avons reçu. Si nous ne changeons pas notre façon de faire, quel héritage laisserons-nous à nos enfants ? Ils pourraient dire que nous leur avons laissé un héritage catastrophique. Il est temps de se regarder en face et de changer la situation. Le Gouverneur de Kinshasa a évoqué de nombreuses réformes, mais elles ne doivent pas rester au stade de discours. Le Ministre a affirmé que l’opération « Kinshasa zéro trou » était réalisée à 80 %, mais quand je circule dans la ville, je me demande si nous sommes dans la même ville. Je pense que, pour dépasser les rapports qu’il reçoit, le Chef de l’État devrait lui-même circuler dans la ville en pleine nuit pour constater les embouteillages causés par les trous dans les routes. Il faut placer les bonnes personnes pour que le changement soit effectif, et non des flatteurs qui ne se soucient que de la dimension politique. Le peuple a besoin de voir un changement concret, surtout dans les infrastructures et les routes.

Mitterrand MASAMUNA

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