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RDC : dossier TFM, l’intersyndicale s’inquiète du sort de plus de 17 000 travailleurs et leurs familles
Le contentieux qui oppose le Gouvernement congolais, à travers la Générale des carrières et des mines (Gécamines SA) et Tenke Fungurume Mining (TFM SA) inquiète de plus en plus l’intersyndicale de TFM qui voit la situation de plus de 17 000 employés de l’entreprise basculée au jour le jour. En cause, la décision des autorités congolaises portant restriction des exportations de cette société.
D’après l’intersyndicale, c’est depuis mi-juillet 2022 que les exportations de TFM sont bloquées en raison d’un différend sur le paiement des redevances de réserves entre l’actionnaire majoritaire de TFM, CMOC et son partenaire public, la Gécamines, où au moins 120 000 tonnes de cuivre et environ 12 500 tonnes de cobalt d’une valeur de plus de 1,5 milliard de dollars avaient été stockées.
Pendant cette période, TFM n’a pas été en mesure de générer des revenus et la situation de l’entreprise devient très critique compte tenu des coûts importants liés au fonctionnement quotidien de leurs installations. Ce qui sans doute pourrait entraîner la cessation de sa production.
Au cours d’un point de presse tenu à Kolwezi, ce mardi 7 mars 2023, Papy Ngoie Simbi, un employé depuis plus de dix (10) ans au sein de cette entreprise a déclaré : « Je suis fier de ma carrière et je vivais une vie sûre avec ma femme et mes enfants grâce à mon salaire, mais maintenant je suis très anxieux. On sait ce que cela signifie pour une entreprise de passer huit mois sans revenus. TFM peut cesser de fonctionner à tout moment et nous pourrons perdre notre emploi. »
Les travailleurs s’inquiètent de la tournure que peut prendre cette crise.
La société TFM est l’un des plus grands employeurs de la province du Lualaba et compte plus de 17 000 employés et sous-traitants, dont plus de 90 % sont des citoyens congolais. La suspension des exportations due à l’impasse des négociations entre TFM et la Gécamines suscite l’inquiétude de tous les employés quant à leurs perspectives de carrière.
Si cette situation persiste, plusieurs familles pourraient se retrouver sans revenus pour arrondir les deux bouts de mois.
Malgré l’arrêt des exportations, l’actionnaire majoritaire CMOC continue pour le moment d’apporter son soutien financier au projet TFM afin que l’entreprise soit en mesure de rémunérer ses employés. Toutefois, de nombreux programmes d’investissements communautaires ont dû être suspendus. Treize (13) projets d’infrastructures inclus dans le Cahier des charges de TFM ont été retardés, tels que la construction d’une nouvelle clinique et d’une école primaire, ou encore la rénovation d’une route. Cet arrêt place également les sous-traitants de ces projets et les PME locales dans une situation économique difficile.
« TFM est un atout précieux pour notre pays et le moyen de subsistance des dizaines de milliers de personnes ; elle ne peut être prise en otage par les intérêts de quelques-uns. J’espère que la Gouverneure du Lualaba et le Président de la République entendront la voix des employés et parviendront à libérer les exportations de TFM rapidement. », a déclaré Christian Ngoie, Président de la délégation syndicale.
Bien que l’État congolais soit en droit de demander ce qui est dû, la suspension des exportations de la TFM risque de créer plus de problèmes qu’elle en résout.
Sur le plan fiscal, le bilan est lourd pour la RDC, à commencer par la province du Lualaba dont 35% des recettes proviennent de TFM. Cette dernière a payé un montant cumulé de 924 millions de dollars US en impôts et taxes au Trésor public de la RDC au cours des trois premiers trimestres de 2022, et représente donc une source de revenus importants pour l’Etat et in fine pour la population.
Cette situation a aussi un impact sur les communes et collectivités locales. La ville de Fungurume a connu une baisse de 90% dans ses projets de développement et n’est plus en mesure de payer ses fonctionnaires depuis janvier 2023.
« Cette décision appartient à la direction de TFM et nous espérons que ce ne sera pas le cas car ce serait un véritable drame pour des dizaines de milliers de personnes(…) Car les exportations sont à l’arrêt depuis 8 mois et notre appel à l’aide de ce matin est celui des travailleurs qui ont peur pour leur avenir et celui de leur famille. Alors oui, grâce au soutien financier de CMOC, les travailleurs sont maintenant payés régulièrement mais je ne pense pas qu’ils soient en mesure de le faire très longtemps. », déplore l’intersyndicale de TFM.
A cette occasion, le personnel de TFM appelle le Gouvernement congolais, et la Gouverneure de Lualaba à prêter attention à leurs inquiétudes et appelle au déblocage de la situation dès que possible pour permettre à TFM de revenir à son rythme normal d’activités.
Mitterrand MASAMUNA