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RDC : « pas d’industrialisation ni développement sans électricité », soutient Bertin Muderhwa de la FEC
Principal orateur du panel ODD7 “énergie pour tous” lors du Forum national sur les objectifs de développement durable (ODD), Bertin Muderhwa, Secrétaire de la Commission Nationale Energie de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC), a démontré que le développement de la République Démocratique du Congo (RDC) ainsi que son industrialisation passent nécessairement par une bonne desserte en électricité.
Tenu les 13 et 14 décembre 2022 à l’Hôtel du Fleuve à Kinshasa, ce forum a mis en exergue le fait que la RDC, quoique pays ayant un grand potentiel en énergie, accuse encore un déficit criant qui se fait sentir dans les ménages, le secteur minier, et l’industrie manufacturière.
Pour le secteur minier, dans la Zone Sud, par exemple, le besoin de plus en plus croissant est estimé à 1 200 MW.
Aussi, il se pose des besoins pressants du développement/industrialisation (PDL-145T, ZES) avec une démographie et urbanisation rapide.
Pour le seul secteur minier, dans la partie Sud-Est du pays, le déficit en énergie électrique est estimé à 1 000 MW. Ce déficit augmente pour atteindre plus de 1 200 MW lorsqu’on intègre l’extension des projets tels que Kamoa Kakula (deuxième mine de production du cuivre au monde), les mines autour de Kisanfu et les autres projets qui sont développés dans la partie Nord et Est du pays.
Les ambitions contenues dans le Plan directeur d’industrialisation vont augmenter les besoins en énergie électrique.
Le déficit en fourniture électrique va en effet se creuser davantage. Ce qui nécessite d’avoir une offre suffisante en termes de production locale d’électricité, insiste le Secrétaire de la Commission nationale Energie de la FEC.
Plusieurs causes sont à la base de ce déficit. Il s’agit à titre illustratif de :
Primo, le retard dans la construction de nouvelles unités de production.
D’après Bertin Muderhwa, la fracture énergétique que connaît la RDC est le résultat du retard accumulé dans le temps du fait de l’absence de la construction de nouvelles unités de production de l’électricité au niveau national.
Notons que les nouvelles capacités de production énergétique n’ont évolué que de moins de 10% sans atteindre 1 500 MW sur les 2 400 MW installés.
Ce retard peut se remarquer dans le réseau Ouest où il faut compter 35 ans entre la mise en service du dernier groupe de la Centrale hydroélectrique INGA II en 1982 et la mise en service du premier groupe de la Centrale de ZONGO II en 2017.
Dans le réseau Sud, c’est plus frappant car il a fallu 66 ans entre la mise en service de la centrale hydroélectrique de Nseke en 1955 et le lancement de la Centrale hydroélectrique de Busanga en 2021.
Secundo: les insuffisances de l’opérateur SNEL dans la réhabilitation et l’entretien des infrastructures suite à la vétusté des Centrales hydroélectriques et des réseaux électriques associés ; faiblesses pour lever et/ou mobiliser les fonds nécessaires pour remettre à niveau les centrales hydroélectriques et les réseaux associés.
Des conséquences de plus en plus criantes :
• faible taux de desserte en électricité ;
• non couverture de manière satisfaisante des besoins de consommation en énergie électrique actuels et futurs exprimés. Et pourtant l’électricité est un intrant majeur dans la transformation ;
• retard du processus d’industrialisation et de la diversification économique ;
• maintien de la population dans la pauvreté.
Face à ce déficit criant, des efforts sont toutefois notés de la part de certains privés comme au niveau du Gouvernement congolais. Ainsi, parmi les avancées du côté de l’Etat, il y a lieu d’évoquer la mise en place de l’Autorité de régulation et de l’Agence nationale pour promouvoir l’électrification rurale et nomination de leurs animateurs.
Ensuite, la réhabilitation et la construction de certaines Centrales hydroélectriques grâce au partenariat public-privé (PPP) entre la SNEL et les entreprises minières.
C’est le cas de la centrale de Mwadingusha réhabilitée avec le partenariat de IVANHOE MINES pour la capacité de 81 MW et la construction de la centrale de BUSANGA avec SICOMINES de capacité 240 MW.
L’Etat congolais a également entrepris des projets avec certains comme :
– La SNEL et Tenke Fungurume Mining (TFM) avec le barrage de Nseke avec une capacité de 240 MW (2022) et Nzilo (120 MW);
– La SNEL et Kamoa/Ivanhoe Mines avec la réhabilitation en cours du Groupe G25 de INGA 2 d’une capacité de 162 MW (2024);
– La SNEL et KCC avec la réhabilitation des Groupes G27 et G28 de INGA 2 de 340 MW (2021).
D’autres projets privés sont en cours de développement comme Kipay Sombwe sur la rivière Lufira au Haut Katanga (166 MW en hydroélectricité et 46 MW en solaire) ; Tembo power sur la rivière Kakule au Lualaba (70 MW en hydro et 50 MW en solaire) ou encore Great Lake Energy sur le Fleuve Congo à Kinsuka – Kinshasa (900 MW en hydroélectricité).
Des projets comme SOCODEE, NURU, VIRUNGA ENERGIES, ENERGIE DU NORD KIVU et autres desservent aussi l’électricité (hydroélectrique et photovoltaique) aux ménages et entreprises locales avec les lignes isolées dans la partie Est du pays.
Pour cet Expert de la Commission Energie de la FEC, il faut améliorer le climat des affaires qui demeure préoccupant avec les multiples taxes et impositions, contrôles intempestifs injustifiés ; encourager les partenariats sur les contrats d’achat d’énergie entre les producteurs locaux et les grands consommateurs d’énergie (sociétés minières et industriels locaux) ; trouver les mécanismes innovants pour le financement des projets énergétiques ; accorder les incitations fiscales et douanières aux opérateurs ; accélérer le traitement et la délivrance des autorisations et documents administratifs ; promouvoir le développement des projets dans les milieux isolés et reculés ; assurer la stabilité et la maintenance du réseau ; lutter contre les vandalismes et sabotages des projets et infrastructures énergétiques et accorder la préférence à la production locale de l’électricité dans les besoins de consommation industrielle.
Ce n’est qu’au prix de ce sacrifice que le besoin en énergie de la RDC sera résorbé, insiste cet expert de la FEC.
Pour rappel, ce forum a été organisé par l’Observatoire Congolais de Développement Durable (OCDD) en pour presenter le rapport de mise en œuvre des ODD en RDC.
L’objectif poursuivi était de faire un état des lieux de la mise en œuvre des ODD en RDC et d’identifier les politiques, les stratégies et les actions pour déclencher des changements profonds et la transition pour accélérer la réalisation des ODD.
Nadine FULA